Annic_Bosmans
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Le 8 mars, tout le monde parle d’égalité des genres. Ce jour-là, les messages percutants circulent, nourris de chiffres et de récits inspirants. Mais pour Annic Bosmans, CEO de Randstad Belgium, le véritable progrès n’est pas une question de grandes déclarations ou de gestes symboliques. « Ce sont les petits pas bien réfléchis qui mènent au changement durable. »

L’un des plus grands obstacles dans la lutte pour l’égalité est que les femmes se sous-estiment. Elles hésitent plus longtemps avant de saisir leur chance, postulent moins vite pour une promotion et sont moins explicitement ambitieuses. Non pas parce qu’elles sont moins compétentes, mais parce qu’elles sont souvent, sans s’en rendre compte, plus modestes que leurs collègues masculins.

La confiance en soi, clé du changement

Les études ne cessent de démontrer que les hommes sont plus prompts à poser leur candidature, même s’ils ne répondent pas complètement aux critères d’un poste. Les femmes, elles, veulent souvent être sûres à 100% d’avoir toutes les compétences requises avant de franchir le pas. J’ai franchi chaque étape de mon parcours chez Randstad, du poste de consultante à celui de CEO, après avoir reçu un coup de pouce de mes supérieurs et de mon équipe. À chaque fois, je me suis demandé si j’étais vraiment prête. Avec le recul, je réalise que j’aurais pu me lancer plus tôt.

La tendance à se sous-estimer est un phénomène structurel que les entreprises doivent activement combattre. La sécurité psychologique – un environnement où on peut apprendre, recevoir du feedback et exprimer un désaccord sans crainte de représailles – est essentiel pour s’épanouir.

La confiance en soi est la clé, mais sans tomber dans l’ego. Le modèle de leadership joue un rôle crucial, car la confiance ne se développe pas dans le vide. En tant que dirigeant, vous avez la responsabilité d’identifier celles et ceux qui ont besoin d’un petit coup de pouce pour aborder l’étape suivante. Le mentorat ne se limite pas aux parcours formels dans une entreprise, il passe aussi par l’exemple des dirigeants. Managers et décideurs doivent être conscients de cette dynamique et stimuler leurs équipes à saisir les opportunités. Non pas en traitant les femmes différemment, mais en créant un environnement de travail où l’évolution interne est encouragée pour tous et où chacun est incité à exprimer ses ambitions.

Ne cherchez pas uniquement votre reflet

Une culture d’entreprise inclusive implique aussi que les responsables remettent en question leurs propres habitudes et préjugés. Nous avons tous tendance à être attirés par des personnes qui nous ressemblent. Dans les processus de recrutement et de promotion, c’est ce qui génère les équipes dirigeantes trop homogènes. Voilà pourquoi il faut que les entreprises encouragent leur management à aller au-delà des candidats ‘évidents’ et à rechercher activement la diversité des équipes.

Il ne s’agit pas que de genre. Le leadership dans une organisation moderne, c’est réfléchir en conscience à votre manière d’évaluer et de sélectionner les talents, sans faire jouer des préférences inconscientes. En se basant sur les compétences et les aptitudes plutôt que ce qui semble connu ou familier, une entreprise avance concrètement vers une gestion plus inclusive.

Un processus continu

Depuis des années, le recrutement de Randstad mise sur les compétences et l’évolution interne, ce qui a mené à une large représentation des femmes à tous les niveaux. Dans les postes de management opérationnel, la majorité des fonctions sont occupées par des femmes, et au niveau de la direction, la répartition est de 50/50. Mais la question est toujours d’actualité : dans certains secteurs comme la finance et l’IT, le rapport reste inégal.

L’inclusion reste un processus, pour Randstad aussi. Nous devons sans cesse œuvrer à une culture où chacun a sa chance et se sent encouragé à la saisir. Cela demande non seulement de sensibiliser les employés, mais aussi les dirigeants, pour qu’ils ne soient plus influencés par des biais inconscients dans leurs décisions.

Petits pas, grand impact

La clé d’un progrès durable n’est pas dans la course aux quotas ou les initiatives d’égalité superficielles. Un véritable changement exige une approche réfléchie, où entreprises et employés ne cherchent pas seulement à avancer, mais s’arrêtent d’abord à la question : Pourquoi le faisons-nous?

Prendre du recul pour accélérer ensuite est souvent essentiel afin de créer une adhésion large. D’abord, les organisations doivent identifier les obstacles et les freins existants:

  • Qu’est-ce qui empêche les gens de saisir les opportunités?
  • Comment briser les préjugés inconscients dans le recrutement et la promotion?
  • Comment adapter nos processus et nos entretiens d’orientation pour stimuler les employés à franchir des étapes?
  • Comment incarner nous-mêmes le leadership inclusif en montrant l’exemple?

En menant cette réflexion en profondeur et en impliquant toutes les parties prenantes concernées, une organisation pose une base bien plus solide pour un progrès durable. Quand les collaborateurs se sentent écoutés, le changement s’accélère. Et l’égalité des genres ne se résume plus à une initiative isolée ou à un grand geste pour la Journée internationale des droits des femmes. Elle devient alors un processus d’amélioration continue, porté à la fois par les dirigeants et les employés, qui construisent ensemble un monde du travail inclusif.

Annic Bosmans, CEO Randstad Group BeLux