Le Dr Annelies Raes (IMEC-groupe de recherche ITEC à la KU Leuven, campus KULAK à Courtrai) étudie la façon dont les technologies peuvent aider étudiants et professeurs. “En 2030, l'enseignant sera plutôt une source d'inspiration et un coach grâce aux nouvelles technologies d'apprentissage.”
“les ordinateurs ne remplaceront pas le cerveau humain.”
Pourrons-nous bientôt remplacer le corps enseignant par une armée de robots? “Certainement pas”, répond Annelies Raes. “En revanche, les nouvelles technologies modifieront fondamentalement l'aspect des salles de classe et les méthodes d'enseignement. D'ici à 2030, l'obligation pour les étudiants d'être présents physiquement à tous les cours fera définitivement partie du passé. Malgré tout, les contacts humains demeureront importants. La technologie devra veiller à garantir cet aspect essentiel de la relation enseignant-élève.”
Certaines classes “hybrides” permettent d'ores et déjà aux étudiants de suivre les cours à distance via des caméras. Pratique pour les élèves absents pour maladie ou qui combinent leurs études avec un travail… Ces élèves sont-ils aussi attentifs, cependant? “Dans une classe, le professeur peut facilement vérifier si son public est concentré. Ce n'est pas possible via un écran. C'est pourquoi nous examinons la manière dont les technologies pourraient nous aider à identifier un manque d'attention des élèves.”
apprendre une langue avec un chatbot
Il faut s'attendre à ce que l'EdTech (Educational Technology) passe bientôt à la vitesse supérieure, avec des chatbots dédiés par exemple à l'apprentissage du néerlandais ou de l'anglais, et avec une réalité virtuelle où les élèves apprendront à se déplacer dans le trafic en toute sécurité, ou qui projettera le dessin d'une veine sur le bras d'étudiants infirmiers afin de leur enseigner à faire une piqûre. Grâce à des simulations, les étudiants en médecine opéreront un mannequin truffé de technologie – réplique parfaite d'un humain – tandis que les professeurs “déclencheront” des complications à partir d'une salle de contrôle.
“Je ne préconise pas de supprimer l'expérience sur le terrain, mais les simulations offrent aux étudiants de vivre des expériences authentiques dans le cadre de l'école.”
Les technologies peuvent d'ailleurs aider dès l'école maternelle. “Nous expérimentons des jeux adaptatifs pour le calcul et l'initiation aux langues, sur mesure pour chaque bambin”, illustre le Dr Raes. “Et avec la technologie Bluetooth qui enregistre le comportement des tout-petits. Cette observation intelligente doit réduire la charge administrative des instituteurs et institutrices de maternelle.”
compétences du XXIe siècle
Les enseignants du futur seront capables d'utiliser aisément les data. Les capteurs physiologiques qui mesurent le pouls et la transpiration peuvent fournir des indications sur la concentration des élèves. Et si un enseignant utilise une vidéo ou des exercices en ligne comme préparation aux cours (flipped classroom), les données enregistrées serviront à évaluer le niveau de connaissance préalable des élèves et révéleront d'éventuelles difficultés. En mesurant l'activité cérébrale, il sera enfin possible d'identifier les zones du cerveau qui s'activent.
“les chatbots peuvent aider les étudiants à apprendre à parler français.”
L'enseignant sera plutôt une source d'inspiration et un coach. “La technologie aidera les enseignants, certes, mais leur mission restera primordiale. Bien que les ordinateurs disposent d'énormes compétences, ils ne remplaceront jamais la flexibilité d'un cerveau humain.”
“De plus en plus de tâches étant vouées à être automatisées, les enseignants devront préparer les travailleurs de demain à remplir des missions non routinières, qui exigent de développer un esprit critique ainsi que la capacité à raisonner et à résoudre des problèmes en équipe. Les enseignants joueront un rôle important dans cet apprentissage. Ils contribueront à construire les compétences du XXIe siècle.”