La formation continue n'est pas inscrite dans l'ADN du Belge. À peine 6,9 % des travailleurs ont suivi une formation en 2016. En Finlande, au Danemark et en Suisse, ce pourcentage se situe autour de 30 %. Il s'agit d'une des conclusions stupéfiantes de l'Institut de Recherche sur le Travail et la Société de la KU Leuven. Notre pays doit investir beaucoup plus dans la formation continue s'il veut désamorcer l'inadéquation croissante entre l'offre et la demande sur le marché du travail. Malgré tous les efforts, les entreprises rencontrent toujours des difficultés pour trouver les bons talents pour leurs postes vacants – près de 150 000(!) dans notre pays. Je ne minimise certainement pas le problème, mais je me demande toutefois si les entreprises investissent suffisamment dans les talents qu'elles ont déjà en interne. Prenez par exemple cette dame qui remplit des tartes de fruits frais à la chaîne le jour et met en scène une pièce de théâtre le soir. Personne ne lui a jamais demandé si elle aimerait utiliser ses talents de régisseuse en tant que cadre dans un environnement numérique. Savoir si elle a déjà exprimé cette ambition et si elle a envie de se former en ce sens est une autre question. La médaille a toujours deux faces.
Randstad est confrontée à ce même défi pour la multitude de personnes que nous accompagnons quotidiennement dans leur recherche d'emploi ou que nous coachons pendant leur carrière. En Belgique, nous proposons aujourd'hui des formations à plus de 8 000 personnes afin de renforcer leur employabilité et augmenter leurs chances de trouver un emploi. Le but est de pouvoir, à terme, le faire pour les dizaines de milliers de personnes qui viennent frapper à notre porte. Nous n'en sommes pas encore là, mais la campagne « Que ferez-vous demain? » – dans le cadre de laquelle nous aidons les candidats à jeter les bases pour que leur employabilité soit à l'épreuve du temps – est un bon début... Le principal mérite de cette campagne est qu'elle incite les gens à réfléchir aux emplois du futur et au potentiel qu'ils offrent. Pour éviter toute confusion, je parle ici d'un futur où ce sont eux qui feront la différence et non les robots ou la technologie.
Les gens préfèrent être compétents plutôt qu'incompétents.
la compétence est un sentiment
Garder l'employabilité à l'épreuve du temps semble fantastique. Mais s'y mettre, comme nous le constatons nous-mêmes, est une autre paire de manches. Cela exige des connaissances, une réflexion à long terme et du courage. Vous pouvez concentrer la recherche des talents disponibles en interne en cinq questions:
- Quelles compétences, au sens large du terme, ai-je déjà en interne aujourd'hui?
- Dans quelle mesure mon personnel est-il curieux et disposé à apprendre?
- De quelles compétences ai-je besoin aujourd'hui? Et dans cinq ans, lorsque mes activités ou ma façon de faire des affaires auront peut-être changé?
- Combien de talents disponibles aujourd'hui puis-je transférer en toute sécurité vers cet avenir? Et qu'en est-il des personnes dont les compétences ne correspondent pas ou qui ne disposent pas d'une capacité ou d'une volonté d'apprendre suffisante?
- Quelles forces agissent comme des leviers qui favorisent ou entravent une telle gestion des compétences? Et comment les activer ou les désactiver?
Pour donner aux talents intrinsèques toutes les chances de s'épanouir, nous offrons à nos collaborateurs un environnement dans lequel ils peuvent donner le meilleur d'eux-mêmes avec la plus grande liberté possible. De plus, ils reçoivent en permanence un feed-back et des stimuli ouverts et constructifs. Pas seulement une fois par an, mais à chaque moment important et à chaque niveau. S'il y a bien une leçon que j'ai tirée du livre «Six batteries of change» de Peter De Prins, professeur en gestion du changement, c'est que les gens préfèrent être compétents plutôt qu'incompétents. Concrètement, cela signifie que la compétence est un sentiment, pas une aptitude. Si vous voulez que les gens changent, vous devez leur donner le sentiment qu'ils ont les compétences nécessaires pour faire face à la nouvelle situation. Si ce n'est pas le cas, ils se rabattront sur leurs compétences antérieures. Même s'ils savent que ce n'est pas le bon comportement.
être poussé dans le dos
La question quatre est une question difficile, voire la plus difficile. Mais elle est nécessaire. Toute entreprise ou organisation honnête avec elle-même sait qu'elle devra un jour laisser partir des gens. Dans l'intérêt de la survie de l'organisation. Il n'est pas naturel de vouloir absolument garder tout le monde à bord. D'ailleurs, le départ de personnel ne doit pas forcément être négatif tant que cela se passe d'une manière responsable et accompagnée. Combien de fois n'entendez-vous pas d'anciens collaborateurs expliquer à quel point ils sont reconnaissants d'avoir été « poussés vers la sortie » parce qu'ils se sentent aujourd'hui beaucoup mieux dans leur peau et à leur place en étant ailleurs? Sans exagérer, je connais très peu de gens qui ont quitté Randstad avec un sentiment amer.
La curiosité et la capacité d'apprendre sont les compétences de base de l'avenir.
L'important est qu'ils aient eu toutes les occasions de découvrir leurs talents intrinsèques et de les développer. Quels qu'ils soient. Tout le monde peut apprendre beaucoup, mais tout le monde ne peut pas apprendre aussi vite ou aussi facilement. Prenez mon exemple. Je ne cuisine jamais. Je suis maladroit et inculte en matière de goût. Je pourrais peut-être réussir à apprendre à cuisiner de manière technique. Mais pourquoi m'investir là-dedans alors que j'acquiers bien mieux et bien plus vite d'autres compétences ? Autrement dit, mettez-moi dans un environnement où l'apprentissage me fera du bien et où je ne le ressentirai pas comme un devoir. « La formation est le nouveau mode de recrutement », était le titre d'un encart récent consacré aux RH dans le journal flamand De Standaard. Battez le fer tant qu'il est chaud! Les entreprises se débrouilleront (devront se débrouiller) avec leurs propres salariés et continuer à les former. C'est à chacun d'entre nous, employeur et salarié, d'entrer avec bon sens et enthousiasme dans cette nouvelle réalité.
Eddy Annys – Directeur général Randstad Belgique